Il importe peu que, pour être qualifiés de dispositif médical, les logiciels agissent directement ou non sur le corps humain, l’essentiel étant qu’ils soient spécifiquement destinés par le fabricant à être utilisé dans un ou plusieurs des buts médicaux figurant dans la définition d’un dispositif médical. Le Snitem, syndicat regroupant les entreprises du secteur des dispositifs médicaux, et une société membre de ce syndicat, ont contesté devant le Conseil d’Etat la légalité des dispositions du décret français n° 2014-1359 du 14 novembre 2014, qui impose une certification des logiciels d’aide à la prescription médicale (LAP) et des logiciels d’aide à la dispensation (LAD), alors même que Philips avait déjà obtenu un marquage CE pour son logiciel de LAP. Suite à ce recours, le Conseil d’Etat a décidé de surseoir à statuer et de demander à la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) si, au sens de la directive 93/42/CEE modifiée le 5 septembre 2007, un logiciel dont l’une des fonctionnalités permet l’exploitation de données propres à un patient, aux fins notamment de détecter les contre-indications, les interactions médicamenteuses et les posologies excessives, constitue, pour ce qui est de cette fonctionnalité, un dispositif médical au sens de ces dispositions, et ce même si un tel logiciel n’agit pas directement dans ou sur le corps humain. Par un arrêt du 7 décembre 2017, la CJUE rappelle d’abord qu’un logiciel constitue un dispositif médical aux fins de la directive précitée lorsqu’il satisfait à deux conditions cumulatives tenant respectivement à la finalité poursuivie et à l’action produite dudit dispositif. A cet égard, elle précise ensuite, d’une part, que s’agissant de la finalité poursuivie, cette directive prévoit qu’un logiciel en lui-même est un dispositif médical lorsqu’il est spécifiquement destiné par le fabricant à être utilisé dans un ou plusieurs des buts médicaux figurant dans la définition d’un dispositif médical, d’autre part, que s’agissant de la condition tenant à l’action produite, il y a lieu de relever que, si la directive prévoit que l’action principale du dispositif médical “dans ou sur le corps humain” ne peut être obtenue exclusivement ni par des moyens pharmacologiques ou immunologiques ni par métabolisme, elle n’exige pas qu’un tel dispositif agisse directement dans ou sur le corps humain. Ainsi, elle considère que, même si l’application agit ou non sur le corps humain, ce qui importe est le fait qu’elle ait été destinée par le fabricant à être utilisée dans un ou plusieurs buts médicaux figurant dans la définition d’un dispositif médical.La CJUE précise enfin, s’agissant des cas où le logiciel médical comprend plusieurs modules dont certains ne répondent pas à la définition du dispositif médical, en s’appuyant sur les lignes directrices de la Commission européenne, que le fabricant devra apposer le marquage CE sur les seuls modules assimilés à un dispositif médical. - CJUE, 4ème chambre, 7 décembre 2017 (affaire C-329/16 - ECLI:EU:C:2017:947), Snitem et Philips France c/ Premier ministre et ministre des Affaires sociales et de la Santé - http://curia.europa.eu/juris/document/document.jsf?text=&docid=197527&pageIndex=0&doclang=fr&mode=lst&dir=&occ=first&part=1&cid=1129449 - Décret n° 2014-1359 du 14 novembre 2014 relatif à l'obligation de certification des logiciels d'aide à la prescription médicale et des logiciels d'aide à la dispensation prévue à l'article L. 161-38 du code de la sécurité sociale - https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000029761800&dateTexte=20180115 - Directive 93/42/CEE du Conseil, du 14 juin 1993, relative aux dispositifs médicaux - http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/HTML/?uri=CELEX:31993L0042&from=FR