Le refus d'accéder aux informations sur l'auteur d'un don de gamète ne porte pas une atteinte excessive aux droits protégés par les articles 8 et 14 de la CESDH et des libertés fondamentales, en raison de plusieurs considérations d'intérêt général. M. A. qui a été conçu par insémination artificielle avec don de gamètes recueilli par le centre d'études et de conservation des œufs et du sperme de l'hôpital Cochin, a demandé en 2011 à l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) de lui communiquer des informations relatives au donneur de gamètes à l'origine de sa conception.Ses demandes ont fait l'objet de décisions de rejet. La Commission d'accès aux documents administratifs, saisie le 25 juillet 2011, a rendu un avis défavorable sur ces demandes et, en l'absence de nouvelles décisions expresses de l'AP-HP, des décisions implicites de rejet des demandes de communication nées le 25 septembre 2011. M. A. se pourvoit en cassation contre le jugement du 27 janvier 2014 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation pour excès de pouvoir des décisions de refus de communication des informations demandées et à ce qu'il soit enjoint à l'AP-HP, sous astreinte, de lui communiquer ces documents. Le 28 décembre 2017, le Conseil d’Etat rejette le pourvoi formé par M. A. La Haute juridiction administrative estime qu’il résulte des dispositions des articles 16-8 du code civil et L. 1211-5 du code de la santé publique, qui posent les limites et les conditions de la divulgation des informations permettant d'identifier celui qui a fait don d'un élément ou d'un produit de son corps et celui qui l'a reçu, qu'elles sont applicables à toutes les demandes de communication d'informations présentées postérieurement à leur entrée en vigueur y compris celles qui se rapportent à un don effectué antérieurement. Le tribunal administratif de Paris n'a pas entaché son jugement d'erreur de droit en faisant application des dispositions précitées à la demande présentée par M.A., né d'un don d'organe effectué antérieurement à leur entrée en vigueur. Il ressort des énonciations du jugement attaqué que le tribunal administratif a écarté les moyens tirés de la méconnaissance des articles 8 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales après avoir relevé que les règles d'accès aux données personnelles d'un donneur de gamètes, fixées par le législateur et sur lesquelles sont fondés les refus litigieux, ne sont pas incompatibles avec les stipulations de ces articles. Il est vrai que la compatibilité de la loi avec les stipulations de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ne fait pas obstacle à ce que, dans certaines circonstances particulières, l'application de dispositions législatives puisse constituer une ingérence disproportionnée dans les droits garantis par cette convention et qu'il appartient par conséquent au juge, lorsque le requérant fait état de telles circonstances particulières, d'apprécier concrètement si, au regard des finalités des dispositions législatives en cause, l'atteinte aux droits et libertés protégés par la convention qui résulte de la mise en œuvre de dispositions, par elles-mêmes compatibles avec celle-ci, n'est pas excessive. Plusieurs considérations d'intérêt général ont conduit le législateur à interdire la divulgation de toute information sur les données personnelles d'un donneur de gamètes puis à écarter toute modification de cette règle de l'anonymat, notamment la sauvegarde de l'équilibre des familles et le risque majeur de remettre en cause le caractère social et affectif de la filiation, le risque d'une baisse substantielle des dons de gamètes, ainsi que celui d'une remise en cause de l'éthique qui s'attache à toute démarche de don d'éléments ou de produits du corps. Au regard de cette dernière finalité, qui traduit la conception française du respect du corps humain, aucune circonstance particulière propre à la situation d'un demandeur ne saurait conduire à regarder la mise en œuvre des dispositions législatives relatives à l'anonymat du don de gamètes comme portant une atteinte excessive aux droits et libertés protégés par la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales. Il en résulte que le moyen tiré de ce que le refus d'accéder aux informations sur l'auteur d'un don de gamète porterait, dans les circonstances particulières de l'espèce, une atteinte excessive aux droits protégés par les articles 8 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant. - Conseil d’Etat, 10ème - 9ème chambres réunies, 28 décembre 2017 (requête n° 396571 - ECLI:FR:CECHR:2017:396571.20171228), M. A. c/ Assistance publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP) - https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriAdmin.do?oldAction=rechJuriAdmin&idTexte=CETATEXT000036411817&fastReqId=1655571861&fastPos=1- Code civil, article 16-8 - https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?idArticle=LEGIARTI000006419303&cidTexte=LEGITEXT000006070721- Code de la santé publique, L. 1211-5 - https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000006072665&idArticle=LEGIARTI000006686063&dateTexte=&categorieLien=cid- Convention européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales - https://www.coe.int/en/web/conventions/full-list/-/conventions/rms/0900001680063776