Est coupable de banqueroute par détournement d'actif le dirigeant effectif d'une association qui, connaissant les graves difficultés financières de celle-ci, s'est sciemment approprié une partie de l'actif de l'association, en continuant à se faire octroyer, après la cessation des paiements, une rémunération excessive.Une association, établissement d'hospitalisation à domicile, est statutairement dirigée par un conseil d'administration et un bureau, et Mme B. en est la directrice générale.L'association a été placée en redressement judiciaire, et la date de la cessation des paiements a été fixée au 1er juin 2014.Mme B. a été poursuivie par le procureur de la République pour avoir commis, en sa qualité de dirigeante de fait de l'association, le délit de banqueroute par détournement d'actif.
La cour d'appel de Fort-de-France a déclaré la prévenue coupable de banqueroute par détournement d'actif.Elle a énoncé que la prévenue a participé directement à la détermination du montant de sa rémunération, laquelle avait été calculée en toute connaissance de cause par référence à une capacité d'accueil de la structure qu'elle dirigeait largement supérieure à sa capacité réelle.
Les juges du fond ont retenu que sur la période de prévention, de juin 2014 à juin 2015, cette rémunération s'est élevée à 236.000 €, et qu'en dépit des difficultés financières de la structure, Mme B. a continué à percevoir un salaire plus de deux fois supérieur à la norme, alors que la rémunération des dirigeants des structures privées exerçant dans le domaine de la santé, et donc financées en totalité par des fonds publics, ne doit pas en principe dépasser les plus hauts salaires de la fonction publique.
Ils ont ajouté que la convention collective applicable ne prévoyant pas explicitement de plafond de rémunération, Mme B. s'était vue allouer un salaire net de l'ordre de 18.000 € par mois, soit un salaire deux à trois fois supérieur à ceux de directeurs d'établissements publics, avait fait remonter son ancienneté de cadre hospitalier au début de sa carrière d'infirmière, et bénéficiait en outre d'une prime de plus de 100.000 €, accordée par le conseil d'administration en dédommagement du temps passé à mettre en place la structure, prime qui avait été lissée sur plusieurs exercices entre 2010 et 2015.
En outre, la cour d'appel retient qu'il est établi que Mme B., informée par l'Agence régionale de santé de la nécessité de modifier substantiellement le niveau de sa rémunération afin de la mettre en adéquation avec la situation financière de la structure, a néanmoins maintenu celle-ci à un niveau correspondant à 7 % de la masse salariale, et ce en dépit de sa connaissance des difficultés financières considérables de la structure, qui ont conduit à une cessation des paiements dès juin 2014.
Dans un arrêt du 18 mars 2020 (pourvoi n° 18-86.492), la Cour de cassation valide le raisonnement des juges du fond et rejette le pourvoi de Mme B.Elle estime que la cour d'appel n'a pas méconnu les articles 121-1 et 121-3 du code pénal, L. 654-1 et L. 654-2 du code de commerce, 388, 459, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale.En effet, la prévenue, qui avait la direction effective de l'association et qui connaissait ses graves difficultés financières, s'est sciemment approprié une partie de l'actif de celle-ci, peu important l'accord du conseil d'administration, en continuant à se faire octroyer, après la cessation des paiements, une rémunération excessive.