L'Etat engage sa responsabilité pour faute lourde lorsque l'erreur du greffe au Bodacc entraîne des dommages conséquents à une société.Le tribunal de grande instance de Paris a, sur demande de la société A., prononcé la liquidation judiciaire d'une SCI. Dans l'avis au Bodacc, publié le 18 mai 2012, le greffe du tribunal de grande instance de Paris a mentionné par erreur le numéro d'immatriculation de la première société. Alerté par le greffe, le Bodacc a publié un avis rectificatif les 2 et 3 juin suivant. Les 17 octobre et 12 novembre 2012, elle a licencié pour motif économique trois de ses salariés et a été placée en liquidation judiciaire.
Les trois salariés ont assigné l'Etat en réparation du préjudice causé par le fonctionnement défectueux du service public de la justice.
La cour d'appel de Paris a dit la faute lourde de l'Etat non établie et a rejeté leurs demandes de dommages intérêts.Elle a retenu que l'erreur commise par le greffe sur le numéro de RCS dans l'avis de publication de la liquidation de la SCI est limitée à un seul élément d'identification de la société et que la confrontation avec les autres éléments permettait de se rendre compte que l'avis ne concernait pas la société A.Elle a ajouté qu'une fois informé de l'erreur commise, le greffe a agi avec célérité pour faire publier un avis rectificatif.
Le 2 septembre 2020 (pourvoi n° 19-19.098), la Cour de cassation casse l'arrêt d'appel.Elle rappelle que l'Etat est tenu de réparer le dommage causé par le fonctionnement défectueux du service public de la justice. Sauf dispositions particulières, cette responsabilité n'est engagée que par une faute lourde ou un déni de justice. Constitue une faute lourde toute déficience caractérisée par un fait ou une série de faits traduisant l'inaptitude du service public de la justice à remplir la mission dont il est investi.La Cour de cassation estime que la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 141-1 du code de l'organisation judiciaire en statuant comme elle l'a fait, par des motifs inopérants ne prenant pas en considération l'importance des conséquences dommageables de l'erreur commise par le greffe du tribunal, garant de l'exactitude des informations communiquées au public.