Le principe de la suspension des poursuites individuelles résultant du droit luxembourgeois fait que toutes les actions patrimoniales introduites postérieurement au jugement d'ouverture de la procédure sont irrecevables.La société P. a souscrit auprès d’une banque de droit luxembourgeois un prêt, seuls les intérêts étant payés pendant la durée du prêt. En garantie de ce prêt, la société P. a consenti une affectation hypothécaire de son actif immobilier.
Par un jugement d'un tribunal luxembourgeois du 8 octobre 2008, la banque a été admise au bénéfice de la procédure de sursis de paiement, convertie en liquidation judiciaire par un jugement du 12 décembre 2008.
Par un acte du 1er février 2011, la société P. a assigné la banque devant le tribunal de grande instance de Draguignan pour obtenir la nullité de l'affectation hypothécaire.
Les intérêts du prêt n'étant plus réglés, la banque a, le 22 février 2011, mis en demeure la société P. de régler les sommes dues dans un délai de huit jours, à défaut de quoi la déchéance du terme serait acquise.Par un jugement du 11 septembre 2014, le tribunal a déclaré l'action recevable, et rejeté les demandes de la société P.
Par un jugement du 30 novembre 2015, la société P. a été mise en redressement judiciaire. Elle a fait l'objet d'un plan de continuation le 9 janvier 2017. La banque a déclaré sa créance en principal et intérêts échus et à échoir, à titre privilégié, qui a été contestée.
La Cour d'appel d'Aix-en-Provence a retenu que l'action de la société P. se heurtait à la règle de la suspension des poursuites individuelles dont bénéficiait la banque et a donc rejeté sa contestation.
Elle a rappelé que le principe de la suspension des poursuites individuelles résultant de l'article 452 du code de commerce du Grand Duché du Luxembourg fait que toutes les actions patrimoniales introduites postérieurement au jugement d'ouverture de la procédure sont irrecevables, si elles sont exercées par des créanciers chirographaires dont la créance est née avant l'ouverture de la procédure de liquidation. Un tel principe n'est pas seulement général et absolu, mais aussi d'ordre public et doit être soulevé d'office par le juge.Au regard du principe posé par ce texte, non seulement une demande de dommages-intérêts est irrecevable, mais aussi la demande d'annulation de l'affectation hypothécaire, de même que la demande en nullité du contrat de prêt, combinée à une demande en limitation des restitutions dues.
Les juges du fonds ont retenu que la société P. qui a saisi le tribunal par un acte du 1er février 2011, postérieur à l'ouverture de la liquidation judiciaire de la banque, d'une demande d'annulation des affectations hypothécaires et qui, en cause d'appel, présente des demandes de nullité et de résolution du contrat de prêt, et de dommages-intérêts, et demande par ailleurs, en cas de succès de l'action en nullité, à ne pas être condamnée à la restitution du capital emprunté, tandis que la créance de la banque est née antérieurement à l'ouverture de la procédure de liquidation, agit en se prévalant de créances antérieures au jugement d'ouverture.Ils en ont déduit que le succès des actions ainsi engagées ne pourrait qu'affecter le patrimoine de la banque et, par suite, le gage des créanciers, que ces actions présentent, en conséquence, un caractère patrimonial et se trouvent soumises au principe de suspension des poursuites individuelles.
Dans un arrêt du 12 novembre 2020 (pourvoi n° 19-10.579), la Cour de cassation rejette le pourvoi de la société P.La cour d'appel, qui a, dans l'exercice de son appréciation souveraine de la teneur et de la portée du droit positif luxembourgeois, retenu que l'action de la société P. se heurtait à la règle de la suspension des poursuites individuelles dont bénéficiait la banque, a légalement justifié sa décision.