L’autorité de chose jugée qui s’attache à la décision irrévocable d’admission d’une créance au passif de la liquidation d’une société civile s’impose à ses associés, de sorte que, s’il n’a pas présenté de réclamation contre cette décision dans le délai fixé, l’associé de la SCI en liquidation judiciaire est sans intérêt à former tierce-opposition à la décision, antérieure, condamnant la société au paiement de la créance et sur le fondement de laquelle celle-ci a été admise.Une banque a consenti des prêts à une société civile immobilière (SCI) qui, par la suite, a été placée en liquidation judiciaire.Assignés en paiement par leur banque en leur qualité d’associés de la SCI, tenus en tant que tels des dettes de celles-ci à proportion de leur part dans le capital social, les consorts X. ont formé tierce-opposition à l’arrêt du 24 mars 2011, qui admet les créances déclarées par la banque à l’encontre de la SCI, et ont demandé l’annulation des contrats de prêt et le rejet de la demande en paiement formée par la banque contre la SCI.
La cour d’appel de Bourges a déclaré recevable la tierce-opposition formée par les consorts X.Elle a retenu que c’est en vain que la banque prétend qu’à défaut pour ceux-ci d’avoir exercé un recours contre l’état des créances dans le délai d’un mois à compter de sa publication au Bodacc le 28 février 2015, la créance en litige a acquis l’autorité de la chose jugée à l’égard de tous, de sorte qu’ils seraient irrecevables à former toute nouvelle contestation portant sur l’existence, la nature ou le quantum de la créance ainsi admise définitivement.Elle a précisé que l’admission définitive de la créance de la banque, dans le cadre et pour les besoins de la liquidation judiciaire de la SCI, n’interdisait nullement aux associés, qui n’étaient ni plus ni moins parties à cette procédure collective qu’à l’instance précédente devant cette cour, d’exercer devant un juge le recours effectif reconnu par le texte précité.Au demeurant, l’examen du bordereau de déclaration de créance montre que la banque n’a pas déclaré d’autre créance que celle résultant précisément de l’arrêt du 24 mars 2011, qui était déjà définitive suite au rejet, le 28 juin 2012, du pourvoi formé contre cet arrêt.Ainsi, pour les juges du fond, les consorts X., qui ont un intérêt manifeste à voir rétracter le jugement dès lors qu’ils sont poursuivis en paiement par la banque pour répondre des dettes sociales de la SCI à proportion de leurs parts dans le capital social, doivent être déclarés recevables en leur tierce-opposition.
Dans un arrêt du 20 janvier 2021 (pourvoi n° 19-13.539), la Cour de Cassation casse l’arrêt d’appel.Elle estime qu’en statuant ainsi la cour d’appel a violé les articles 1351, devenu 1355, du code civil, 583 du code de procédure civile et R. 624-8, alinéa 4, du code de commerce.Elle rappelle que l’autorité de chose jugée qui s’attache à la décision irrévocable d’admission d’une créance au passif de la liquidation d’une société civile s’impose à ses associés, de sorte que, s’il n’a pas présenté contre une telle décision la réclamation prévue par l’article R. 624-8 du code de commerce, dans le délai fixé par ce texte, l’associé d’une société civile en liquidation judiciaire est sans intérêt à former tierce-opposition à la décision, antérieure, condamnant la société au paiement de ladite créance et sur le fondement de laquelle celle-ci a été admise.Or, en l’espèce, les consorts X. ne contestaient pas ne pas avoir, en tant qu’intéressés au sens de l’article R. 624-8, alinéa 4, du code de commerce, présenté contre l’état des créances dans le délai d’un mois à compter de sa publication au Bodacc, la réclamation prévue par ce texte, lequel leur ouvrait un accès effectif au juge au sens de l’article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, de sorte que, faute d’intérêt, leur tierce-opposition à l’arrêt condamnant la SCI, n’était pas recevable.