Le liquidateur judiciaire est personnellement responsable des détournements de fonds commis par un avocat qui l’assistait, hors de tout mandat de représentation en justice, à l’occasion d’une tâche incombant personnellement au liquidateur sans que cette mission d'assistance ait été soumise à l'autorisation du président du tribunal.Les tâches que comporte l'exécution de leur mandat incombent personnellement aux mandataires judiciaires désignés par le tribunal. Toutefois, ils peuvent, lorsque le bon déroulement de la procédure le requiert et sur autorisation motivée du président du tribunal, confier sous leur responsabilité à des tiers une partie de ces tâches.
En l’espèce, la société M. a été désignée en qualité de liquidateur de diverses sociétés. Elle a confié des missions à M. C, avocat au barreau de Bordeaux, qui, à l'occasion de ces missions, s'est rendu coupable de détournements de fonds revenant aux différentes liquidations judiciaires.L’assureur des avocats inscrits au barreau de Bordeaux pour la représentation des fonds et valeurs reçus par eux à l'occasion de leur activité professionnelle a été condamné à verser diverses sommes à la société M. au titre des détournements commis par son assuré au préjudice des trois liquidations judiciaires.L’assureur a engagé une action subrogatoire en responsabilité contre la société M. à titre personnel.
La cour d'appel de Paris a débouté l’assureur de ses demandes.Elle a relevé que le litige intéressant le bail commercial d'un local appartenant à la société en liquidation avait donné lieu à une assignation en paiement des loyers et s'était terminé par un avenant de résiliation amiable rétroactive de ce bail, conclu avec l'assistance de M. C. qui avait débouché sur le paiement par le locataire d'une somme.Elle a retenu que l'intervention de M. C. ne s'était pas bornée à recevoir une somme d'argent mais s'était située au sein d'un processus d'assistance en justice de la société M.Elle en a déduit que la tâche confiée à M. C. ne faisait pas partie de celles qu'un liquidateur doit accomplir personnellement.
Dans un arrêt du 30 juin 2021 (pourvoi n° 20-13.722), la Cour de cassation casse l’arrêt d’appel sur ce point.Elle estime que la cour d'appel a violé l'article 1382, devenu 1240, du code civil, et l'article L. 812-1, alinéa 2, du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi du 6 août 2015, en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que les détournements de fonds commis par M. C. avaient été rendus possibles par une assistance de celui-ci à la société M., hors de tout mandat de représentation en justice, à l'occasion de la conclusion d'un avenant de résiliation d'un bail commercial, qui constituait une tâche incombant personnellement au liquidateur, et qu'à supposer que le bon déroulement de la procédure eût requis l'assistance de M. C., il convenait de soumettre, sous la responsabilité du liquidateur, l'intervention de l'avocat à une autorisation motivée du président du tribunal.