La recevabilité de l'action en responsabilité engagée par un associé contre un tiers est subordonnée à l'allégation d'un préjudice personnel et distinct de celui qui pourrait être subi par la société elle-même, c'est-à-dire d'un préjudice qui ne puisse être effacé par la réparation du préjudice social. Le seul fait que cet associé agisse sur le fondement de la responsabilité contractuelle ne suffit pas à établir le caractère personnel du préjudice allégué.La société X. Group, dont M. X., auteur, compositeur et producteur français, était l'actionnaire de référence, a pour activité la production et la distribution de programmes télévisés. Elle a confié à la société E., banque d'affaires et d'investissements, la mission de l'assister dans la réalisation d'une opération d'adossement à un nouvel actionnaire de référence.Estimant que les offres qui lui avaient été présentées par la société E. étaient irréalistes et insuffisantes au regard de la valorisation du catalogue de la société et soutenant que la société E. avait oeuvré dans le but de faire baisser les cours de bourse afin de permettre l'acquisition à vil prix de la société X. Group, M. X. l'a assignée en réparation de son préjudice financier et de son préjudice moral, qu'il imputait aux fautes commises par cette société dans l'exécution de son mandat.M. X. étant décédé, son fils, M. N., a repris l'instance en sa qualité d'héritier.
La cour d'appel de Paris a déclaré recevable la demande de M. N., pris en sa qualité d'héritier de M. X., en réparation de son préjudice financier, retenant que ce dernier était une des parties au contrat de mandat en qualité d'actionnaire et qu'il était envisagé de trouver un repreneur pour racheter son bloc de participation au sein du groupe.
Dans un arrêt du 4 novembre 2021 (pourvoi n° 19-12.342), la Cour de cassation casse l'arrêt d'appel.Elle rappelle qu'il résulte des articles 1382, devenu 1240, du code civil et 31 du code de procédure civile que la recevabilité de l'action en responsabilité engagée par un associé contre un tiers est subordonnée à l'allégation d'un préjudice personnel et distinct de celui qui pourrait être subi par la société elle-même, c'est-à-dire d'un préjudice qui ne puisse être effacé par la réparation du préjudice social. Le seul fait que cet associé agisse sur le fondement de la responsabilité contractuelle ne suffit pas à établir le caractère personnel du préjudice allégué.Elle estime que la cour d'appel a privé sa décision de base légale en se déterminant comme elle l'a fait, sans rechercher, comme elle y était invitée, si le préjudice financier allégué par M. X. en sa qualité d'actionnaire n'était pas, en tout ou partie, le corollaire du préjudice subi par la société X. Group du fait de la dépréciation alléguée du catalogue d'oeuvres constituant son principal actif.