Une juridiction d’instruction ne peut pas prononcer un non-lieu du fait de la dissolution d’une société absorbée si les charges sont suffisantes, sans vérifier que les conditions d’exercice d’une action contre la société absorbante sont remplies.Une plainte a été déposée, avec constitution de partie civile, du chef d’abus de biens sociaux commis par une société lors d’une opération en 1991. Le 30 novembre 2005, son actionnaire unique a décidé de sa dissolution par anticipation et de la transmission universelle de son patrimoine au profit de cet actionnaire.Le juge d’instruction a ordonné un non-lieu.
La cour d’appel de Versailles a confirmé cette décision. Elle a rappelé l’article 121-1 du code pénal qui pose le principe selon lequel chacun est responsable de son propre fait. Selon la jurisprudence en cours, ce principe s’oppose à ce qu’une société absorbante soit poursuivie et condamnée pour des faits commis par la société absorbée, antérieurement à une opération de fusion-absorption.Les juges du fond ont notamment retenu une définition classique de la responsabilité pénale, rejetant ainsi la demande de réinterprétation du requérant. Celui-ci se fondait sur les nouvelles réalités économiques et sur le fait que la fusion-absorption pouvait constituer un moyen, pour la société absorbée, d'échapper aux conséquences de ses actes.
La Cour de cassation dans un arrêt du 13 avril 2022 (pourvoi n° 21-80.653), casse et annule l’arrêt d’appel aux visas des articles 121-2 du code pénal et 593 du code de procédure pénale.Elle relève qu’en cas de fusion-absorption, la société absorbante peut être condamnée pénalement pour des faits commis avant l’opération dans deux hypothèses. La première est celle d’une opération conclue avant le 25 novembre 2020 et qui entre dans le champ d’application de la directive 78/855/CEE du 9 octobre 1978.La seconde concerne une opération qui a eu pour objectif de faire échapper la société absorbée à sa responsabilité pénale.
La Haute juridiction judiciaire considère que les juridictions d’instruction ne peuvent pas prononcer une décision de non-lieu, fondée sur la dissolution de la société absorbée, contre laquelle elles considèrent qu’il y a des charges suffisantes pour les faits dont elles sont saisies. Il faut vérifier, préalablement, soit d’office, soit à la demande d’une partie, si les conditions pour exercer les poursuites contre la société absorbantes sont susceptibles d’être remplies, ce qui était le cas en l'espèce.