La CJUE apporte des précisions sur la notion d’entreprise en difficulté à prendre en compte pour l'attribution ou non d'un financement par le Fonds européen de développement régional (FEDER).Dans le cadre d’un appel public en vue de la sélection de projets pour l’octroi d’un financement dans le cadre du programme de co-financement par le Fonds européen de développement régional (FEDER) "Croissance et emploi", une société à responsabilité limitée de droit letton a présenté une proposition de projet à l’agence nationale compétente le 30 avril 2019, date limite de dépôt des propositions de projet. La société a joint à sa proposition un accord de son assemblée des associés datant du 29 avril 2019, concernant la modification de ses statuts et l’augmentation de son capital statutaire au moyen du paiement, par un associé donné, dans un délai déterminé, de nouvelles parts sociales, avec prime d’émission.
Pendant la période d’évaluation, la société a informé l’agence nationale compétente que l’augmentation du capital statutaire avait été inscrite au registre du commerce le 24 juillet 2019 et, ultérieurement, elle a produit, à titre complémentaire, un rapport d’activité intermédiaire approuvé par un auditeur assermenté.
Par sa décision de rejet, le ministère des Finances a écarté la proposition de la société au motif que cette société devait être considérée, à la date de la présentation de sa proposition, comme une "entreprise en difficulté", au sens de l’article 2, point 18, sous a), du règlement n° 651/2014 du 17 juin 2014.
Saisie d’un recours en annulation contre cette décision, l’Administratīvā rajona tiesa (tribunal administratif de district, Lettonie), a introduit plusieurs demandes préjudicielles relatives :- à la qualité d’"entreprise en difficulté", au sens de l’article 2, point 18, sous a), de ce règlement ;- à l'interprétation de la notion de "capital social souscrit" (article 2, point 18, sous a), du règlement n° 651/2014) à la lumière de la notion de "capital statutaire" figurant dans la réglementation nationale lettone, comme désignant le seul capital social ayant fait l’objet d’une mesure de publicité, conformément aux procédures spécifiées dans la législation nationale ;- à la pertinence des exigences concernant les documents à présenter, dans le cadre de la procédure de sélection, pour l’évaluation de la situation financière du candidat et aux possibles corrections d'éventuelles insuffisances de la proposition en termes de preuve de la situation financière du soumissionnaire.
Dans un arrêt du 27 janvier 2022 (affaire C-347/20), la Cour de justice de l'Union européenne dit pour droit que l’article 2, point 18, sous a), du règlement (UE) n° 651/2014 doit être interprété en ce sens que, afin de déterminer si une société est "en difficulté", au sens de cette disposition, l’expression "capital social souscrit" doit être comprise comme se référant à l’ensemble des apports que les associés ou les actionnaires actuels ou futurs d’une société ont réalisés ou se sont irrévocablement engagés à réaliser.
Elle ajoute que l’article 3, paragraphe 3, du règlement (UE) n° 1301/2013 du 17 décembre 2013, relatif au FEDER, doit être interprété en ce sens que, pour déterminer si un soumissionnaire doit être considéré comme n’étant pas "en difficulté", au sens de l’article 2, point 18, du règlement n° 651/2014, l’autorité de gestion compétente doit seulement tenir compte des preuves conformes aux exigences fixées lors de l’établissement de la procédure de sélection des projets, pour autant que ces exigences soient conformes aux principes d’effectivité et d’équivalence, ainsi qu’aux principes généraux du droit de l’Union, tels que, notamment, les principes d’égalité de traitement, de transparence et de proportionnalité.
Enfin, la CJUE précise que l’article 125, paragraphe 3, du règlement (UE) n° 1303/2013 du 17 décembre 2013 ainsi que les principes de non-discrimination et de transparence auxquels cette disposition se réfère doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à une réglementation nationale selon laquelle les propositions de projet ne peuvent pas faire l’objet de précision après la date limite de dépôt desdites propositions.Toutefois, conformément au principe d’équivalence, cette impossibilité, pour les soumissionnaires, de compléter leur dossier après la date limite de dépôt des propositions de projet doit concerner toutes les procédures susceptibles, le cas échéant, d'être considérées comme étant comparables au regard de leur objet, de leur cause et de leurs éléments essentiels à celle prévue pour bénéficier d'un soutien du Fonds européen de développement régional.