Le temps durant lequel un agent bénéficie pour les périodes d’astreinte, d’un logement proche de son lieu de travail mis à sa disposition par son employeur pour des besoins de service, n’est pas un temps de travail effectif, si cet agent n'est pas à la disposition permanente et immédiate de son employeur et peut, hors des temps d'intervention, librement s’occuper.
La création d'un service au centre hospitalier de Vire a entraîné l'organisation d'astreintes de nuit et la répartition du temps de travail pour chaque période de 24 heures, entre un temps de travail effectif de 15 heures compris entre 8 heures et 23 heures, et un temps d'astreinte de 9 heures compris entre 23 heures et 8 heures. Durant ce temps d'astreinte, les infirmières anesthésistes devaient être en mesure de rejoindre rapidement l'établissement. Infirmière anesthésiste en fonction dans ce centre hospitalier, Mme A. a demandé au tribunal administratif de Caen de condamner ledit centre à lui verser les sommes correspondant au paiement en tant que temps de travail effectif des heures d'astreinte qu'elle a effectuées entre 2008 et 2012. Par un jugement, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.
Par un arrêt du 10 décembre 2015, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté l'appel formé par Mme A. contre ce jugement. Elle retient que les périodes d'astreinte effectuées par Mme A. dans le logement mis à disposition par le centre dans l'enceinte de l'hôpital ne constituent pas du temps de travail effectif, puisque celle-ci “n'était pas à la disposition permanente et immédiate de son employeur et pouvait, en dehors des temps d'intervention, vaquer librement à des occupations personnelles”.
Dans un arrêt du 13 octobre 2017, le Conseil d’Etat valide le raisonnement de la cour administrative d’appel de Nantes. Il commence par rappeler que les dispositions des articles 5 et 20 du décret du 4 janvier 2002 relatif à l'organisation et à la réduction du temps de travail dans les établissements publics de santé distinguent respectivement, d'une part, “les périodes de travail effectif durant lesquelles les agents sont à la disposition de leur employeur et doivent se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles” et, d'autre part, “les périodes d'astreinte durant lesquelles les agents ont l'obligation d'être en mesure d'intervenir pour effectuer un travail au service de l'établissement”.Il observe que “la circonstance que l'employeur mette à la disposition des agents, pour les périodes d'astreinte, un logement situé à proximité ou dans l'enceinte du lieu de travail”, afin qu’ils puissent facilement rejoindre le service dans les délais nécessaires, “n'implique pas que le temps durant lequel un agent bénéficie de cette convenance soit qualifié de temps de travail effectif”, du moment que cet agent n'est pas à la disposition permanente et immédiate de son employeur et peut, en dehors des temps d'intervention, vaquer librement à des occupations personnelles.Il considère même que la cour administrative d’appel pouvait, sans pour autant commettre une erreur de droit, retenir que les périodes d'astreinte litigieuses n'avaient pas à être requalifiées en temps de travail effectif, du fait de la fréquence des interventions que Mme A. a été amenée à effectuer durant les heures comprises entre 23 heures et 8 heures.
- Conseil d’Etat, 5ème et 4ème chambres réunies, 13 octobre 2017 (requête n° 396934 - ECLI:FR:CECHR:2017:396934.20171013), Mme B. A. c/ Centre hospitalier de Vire - https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriAdmin.do?oldAction=rechJuriAdmin&idTexte=CETATEXT000035803947&fastReqId=688080125&fastPos=1
- Décret du 4 janvier 2002 relatif à l'organisation et à la réduction du temps de travail dans les établissements publics de santé, article 5 - https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexteArticle.do;jsessionid=77260B8355AC893AD274AEF0F790682C.tplgfr28s_3?idArticle=LEGIARTI000006725350&cidTexte=LEGITEXT000005632044&dateTexte=20171124
- Décret du 4 janvier 2002 relatif à l'organisation et à la réduction du temps de travail dans les établissements publics de santé, article 20 - https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexteArticle.do;jsessionid=77260B8355AC893AD274AEF0F790682C.tplgfr28s_3?idArticle=LEGIARTI000023952950&cidTexte=LEGITEXT000005632044&dateTexte=20171124