Le propriétaire indivis de droits sociaux a la qualité d’associé et peut, à ce titre, demander en justice l’ajournement d’une assemblée générale extraordinaire s’il justifie agir à des fins conservatoires dans l’intérêt de l’indivision.Deux sociétés actionnaires d'une SA en liquidation ont cédé leur participation à une société de droit luxembourgeois.L'acte prévoyait différentes conditions suspensives, dont l'absence de toute décision de justice empêchant la cession ou limitant la possibilité pour l'acquéreur d'acquérir les actions cédées, et l'émission, par la SA deux jours ouvrés avant la date de réalisation de la cession, d'obligations à bons de souscription d'actions (OBSA), que le cessionnaire s'engageait à souscrire en utilisant les droits préférentiels de souscription des vendeurs familiaux, ceux-ci renonçant corrélativement à ces droits en faveur du cessionnaire.Une assemblée générale extraordinaire de la société a été fixée pour voter sur l'émission de l'emprunt obligataire, sur les pouvoirs et délégations de compétence à conférer au directoire ainsi que sur la suppression du droit préférentiel de souscription des salariés de la société.Soutenant que l'émission des OBSA était prématurée, qu'elle n'avait pas donné lieu à une information suffisante des actionnaires et qu'elle privait de toute substance le droit de préférence dont ils prétendaient disposer en vertu d'un pacte d'actionnaires, 3 actionnaires ont entendu obtenir, en référé, l'ajournement de cette assemblée générale. Une ordonnance ayant déclaré l'une des actionnaires irrecevable faute d'intérêt à agir et rejeté les demandes des deux autres, l'assemblée générale extraordinaire s'est tenue.
La cour d'appel de Grenoble a rejeté les demandes d'ajournement de l'assemblée générale extraordinaire en retenant que celle-ci pouvait décider de l'émission d'OBSA et de l'ouverture des opérations de souscription, ces décisions étant nécessairement soumises à la même condition suspensive d'autorisation judiciaire. Elle retient de plus que l'une des associées n'a pas la qualité pour agir. En effet, selon la cour, celle-ci n'allègue et ne justifie, ni de sa qualité de mandataire de l'indivision au sens de l'article 1844, alinéa 2, du code civil, ni de son souhait de procéder à un acte conservatoire dans l'intérêt de l'indivision, dont elle ne dit pas qu'elle serait en péril.
La Cour de cassation, par un arrêt du 7 juillet 2020 (pourvoi n° 18-19.330), casse et annule l'arrêt de la cour d'appel. au visa des articles 1844, alinéa 1, et 815-2 du code civil. En effet, il résulte de la combinaison de ces textes que le propriétaire indivis de droits sociaux, qui a la qualité d'associé, peut prendre les mesures nécessaires à la conservation des actions indivises et, à ce titre, agir en justice aux fins d'ajournement d'une assemblée générale extraordinaire ayant pour ordre du jour l'émission de titres donnant accès au capital de la société émettrice.