Le Conseil constitutionnel juge conformes à la Constitution les deuxième et troisième alinéas de l'article L. 332-1 du code du sport, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2016-564 du 10 mai 2016 renforçant le dialogue avec les supporters et la lutte contre le hooliganisme.
Le Conseil constitutionnel a été saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) relative à la conformité à la Constitution des deuxième et troisième alinéas de l'article L. 332-1 du code du sport, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2016-564 du 10 mai 2016 renforçant le dialogue avec les supporters et la lutte contre le hooliganisme.
L'association requérante reproche aux dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 332-1 de confier des pouvoirs de police à une personne privée, en violation de l'article 12 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. Ces dispositions porteraient également atteinte à la liberté d'aller et de venir, au principe de légalité des délits et des peines, à la présomption d'innocence, aux droits de la défense, et seraient entachées d'incompétence négative. L'association requérante soutient, par ailleurs, que les dispositions du troisième alinéa de l'article L. 332-1 seraient contraires au droit au respect de la vie privée.
Concernant le deuxième alinéa de l'article L. 332-1 du code du sport…
Aux fins de contribuer à la sécurité des manifestations sportives à but lucratif, le deuxième alinéa de l'article L. 332-1 du code du sport permet à leurs organisateurs de refuser ou d'annuler la délivrance de titres d'accès à ces manifestations ou d'en refuser l'accès aux personnes qui ont contrevenu ou contreviennent aux dispositions des conditions générales de vente ou du règlement intérieur relatives à la sécurité de ces manifestations.
En premier lieu, l'article 12 de la Déclaration de 1789 interdit de déléguer à des personnes privées des compétences de police administrative générale inhérentes à l'exercice de la "force publique" nécessaire à la garantie des droits. En conférant aux organisateurs de manifestations sportives à but lucratif le pouvoir de refuser l'accès à ces manifestations, le législateur ne leur a pas délégué de telles compétences. Par conséquent, le grief tiré de la méconnaissance de l'article 12 de la Déclaration de 1789 doit être écarté.
En deuxième lieu, le fait d'interdire l'accès à l'enceinte d'une manifestation sportive à but lucratif dont l'entrée est subordonnée à la présentation d'un titre ne porte pas atteinte à la liberté d'aller et de venir.
En troisième lieu, le fait, dans le but de garantir la sécurité des manifestations sportives à but lucratif, d'en refuser l'accès à une personne ayant manqué à ses obligations contractuelles relatives à la sécurité ne constitue pas une sanction ayant le caractère d'une punition, ni une mesure adoptée à l'issue d'une procédure juridictionnelle. Dès lors, les griefs tirés de la méconnaissance du principe de légalité des délits et des peines, de la présomption d'innocence et des droits de la défense sont inopérants.
En dernier lieu, il ressort des travaux parlementaires que les organisateurs de manifestations sportives prononçant de tels refus doivent s'assurer, sous le contrôle du juge, que ces mesures sont proportionnées au regard, notamment, des délais écoulés depuis les faits reprochés et du risque de renouvellement de ceux-ci. Les dispositions contestées, qui ne sont pas entachées d'incompétence négative, ne méconnaissent donc aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit.
En conséquence, le Conseil constitutionnel estime que les dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 332-1 du code du sport doivent être déclarées conforme à la Constitution.
S'agissant du troisième alinéa de l'article L. 332-1 du code du sport…
La liberté proclamée par l'article 2 de la Déclaration de 1789 implique le droit au respect de la vie privée. Par suite, la collecte, l'enregistrement, la conservation, la consultation et la communication de données à caractère personnel doivent être justifiés par un motif d'intérêt général et mis en œuvre de manière adéquate et proportionnée à cet objectif.
Le troisième alinéa de l'article L. 332-1 du code du sport permet aux organisateurs de manifestations sportives à but lucratif d'établir un traitement automatisé de données à caractère personnel recensant les personnes qui ont contrevenu ou contreviennent aux dispositions des conditions générales de vente ou du règlement intérieur relatives à la sécurité de ces manifestations.
En autorisant l'établissement d'un tel fichier, le législateur a entendu renforcer la sécurité des manifestations sportives à but lucratif, en permettant à leurs organisateurs d'identifier les personnes susceptibles d'en compromettre la sécurité. Il a ainsi poursuivi un objectif d'intérêt général.
Il ressort du texte adopté et des débats parlementaires que, par ces dispositions, le législateur n'a pas entendu déroger aux garanties apportées par la loi du 6 janvier 1978 mentionnée ci-dessus relatives notamment aux pouvoirs de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, qui s'appliquent aux traitements en cause. Le fichier prévu par les dispositions contestées ne peut être établi que par les organisateurs de manifestations sportives à but lucratif. Il ne peut recenser que les personnes qui ont contrevenu ou contreviennent aux dispositions des conditions générales de vente ou du règlement intérieur relatives à la sécurité de ces manifestations. Il ne peut être employé à d'autres fins que l'identification desdites personnes en vue de leur refuser l'accès à des manifestations sportives à but lucratif.
Il en résulte que le traitement de données prévu par les dispositions contestées est mis en œuvre de manière adéquate et proportionnée à l'objectif d'intérêt général poursuivi.
Par suite, les dispositions du troisième alinéa de l'article L. 332-1 du code du sport, qui ne méconnaissent ni le droit au respect de la vie privée, ni aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent être déclarées conformes à la Constitution.
Dans une décision du 16 juin 2017, le Conseil constitutionnel juge conformes à la Constitution les deuxième et troisième alinéas de l'article L. 332-1 du code du sport, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2016-564 du 10 mai 2016 renforçant le dialogue avec les supporters et la lutte contre le hooliganisme.
- Conseil constitutionnel, 16 juin 2017 (décision n° 2017-637 QPC - ECLI:FR:CC:2017:2017.637.QPC) - https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2017/2017637qpc.htm
- Code du sport, article L. 332-1 - https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?idArticle=LEGIARTI000032514105&cidTexte=LEGITEXT000006071318&dateTexte=20170616&fastPos=4&fastReqId=1084950523&oldAction=rechCodeArticle
- Constitution du 4 octobre 1958 - https://www.legifrance.gouv.fr/Droit-francais/Constitution/Constitution-du-4-octobre-1958
- Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 - https://www.legifrance.gouv.fr/Droit-francais/Constitution/Declaration-des-Droits-de-l-Homme-et-du-Citoyen-de-1789